La meilleure façon d’aider les autres c’est d’être heureux

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Les émotions sont ce qui fait notre force en tant qu’être humain. Elles sont tellement puissantes qu’elles influencent nos proches et les personnes que nous croisons, sans que nous nous en rendions compte. En effet, des émotions telles que la colère ou la peur sont de vraies secousses. Ce sont des vagues émotionnelles qui emportent les autres avec vous.

Dans cet article je présenterai donc l’intérêt de « se prendre en main », de trouver son propre équilibre, si l’on veut aider les autres.

Prendre soin des autres

Il y a certainement des âges de la vie où l’on a plus envie de prendre soin de son prochain. Il y a aussi des métiers qui tendent plus que d’autres à développer la compassion.

Je me souviens avoir été marqué par le discours des jeunes diplômés du bac qui candidataient aux Instituts de Formation en Soins infirmiers. Jusqu’à encore l’année dernière, pour rentrer dans ces instituts il fallait passer un concours écrit puis un entretien oral. A de nombreuses reprises j’ai été jury de ces oraux et j’ai remarqué que le discours des candidats étaient souvent le même. Ils voulaient faire un métier « technique » (comprendre infirmer c’est plus qualifié qu’aide-soignant) mais surtout un métier qui soit utile aux autres. Ils avaient une réelle envie d’aider les autres, d’être « soignant ».

De façon générale, les métiers qui sont portés sur l’humain sont souvent recherchés par ces jeunes en besoin d’aider les autres. Dans leur enfance et leurs parcours de vie, ils ont souvent été confrontés à des difficultés (sociales, médicales) et pour eux, le meilleur moyen de « réparer » consiste à « rendre ». Le sens qu’ils veulent donner à leur vie (ne serait-ce qu’à ce moment de leur vie) est en lien avec le besoin d’aider. Mais sont-ils suffisamment armés pour ça ?

Tout le monde s’accorde à dire que travailler avec de l’humain est ce qu’il y a de plus difficile. Et si vous êtes trop empathique, vous vous laissez vite envahir par les émotions des autres. De plus, et malgré toute leur bonne volonté, ces jeunes sont-ils assez stables émotionnellement pour renvoyer autant de positif qu’ils le souhaitent ?

Le danger de l’empathie

L'empathie

L’empathie est certainement ce que nous avons de plus beau. C’est ce que nous avons de plus humain et d’intelligent d’un point de vue évolutionniste. Elle renvoie à notre faculté intuitive à se mettre à la place d’autrui et à percevoir ce qu’il ressent, tant d’un point de vue cognitif (j’essaye de comprendre ce que l’autre ressent et pense quand il a l’air triste) que d’un point de vue émotionnel (je ressens de la tristesse quand quelqu’un pleure). Avec un certain entrainement on peut développer cette compétence, mais elle reste en grande partie génétique. Il est aisé de remarquer chez les enfants que certains sont plus empathiques que d’autres.

En outre, comme je l’ai précisé la capacité d’empathie est vraiment remarquable. C’est ce qui nous rend un peu plus humain. Mais c’est aussi ce qui peut nous brûler les ailes si nous n’en prenons pas soin. Depuis plusieurs années, on parle régulièrement du burnout, cet état psychologique dans lequel une personne est comme vidée de ses émotions. Comme-ci la piscine des émotions avait débordée et s’était vidée. La comédienne Muriel Robin en parle très bien, elle utilise la métaphore d’une maison brûlée. « C’est comme une maison dont les quatre murs sont intacts et dont l’intérieur est cramé. »

Bien difficile en effet le métier de comédien, de psychologue ou de soignant. Vous devez être empathique, vous devez ressentir ce que les autres ressentent pour être « bon », mais si vous êtes trop empathiques, vous vous cramez. C’est ce qu’essaye de vous enseigner les professeurs de théâtre : « joue le jeu, interprète, mais ce n’est pas toi. » Il faut apprendre à ressentir sans être à la place de… Facile à dire.

De plus, vous devez comprendre que dans l’empathie il y a une part très intellectuelle, mais il y aussi une part très instinctive. En bon chimpanzé que nous sommes, nous ressentons instinctivement les émotions des autres. Si votre collègue de travail à côté de vous est stressé, vous le ressentez. Si votre meilleure amie est en colère, vous le ressentez. Comment ? De façon consciente comme je l’ai dit, via le ton de la voix, la tournure des phrases ou les mots choisis. Mais dans ce genre de situations, notre instinct animal est très puissant. Il s’alarme très vite de la force d’un regard trop appuyé, ou de ce corps qui est trop raide, près à attaquer au moindre faux pas. Puis votre système olfactif réagit. Il ressent toutes les hormones de stress et de peur que le chimpanzé à côté de vous renvoie. Vous ne voyez pas les hormones circuler, elles n’activent donc pas votre système rationnel, mais votre cerveau reptilien sait, il est lui aux aguets.  C’est pourquoi, sans que vous sachiez vraiment l’expliquer, la présence de certaines personnes est parfois très dérangeante.

Les vagues émotionnelles

Revenons aux jeunes étudiants infirmiers et aux métiers de soin. Malgré toute leur bonne volonté, leurs émotions de peur et d’anxiété face aux difficultés de l’hôpital vont inévitablement impacter les patients. Les émotions agissent comme des vagues. Et plus les vagues sont fortes, plus elles emportent de monde dans leur sillage. La figure ci-après illustre cette métaphore. Celui qui est stable émotionnellement, voire assez neutre, ne créé que des petites vagues. A l’inverse, celui qui est instable émotionnellement est plus sensible aux courants et déborde assez facilement. Une des difficultés, qu’il ne perçoit que rarement car il est pris dans sa propre tempête, c’est qu’il entraine les autres dans ses remous.

Figure 1 : Profil stable émotionnellement

Figure 2 : Profil avec fort ressenti émotionnel négatif

Figure 3 : Impact du ressenti émotionnel négatif sur les personnes proches

De fait, celui qui a peur déteint sur les autres. Il transmet sa peur aux autres. Celui qui est en colère, met les autres mal à l’aise, voir active leur système de défense. Être pris par des vagues émotionnelles négatives est bien-sûr difficile pour chacun, mais retenez que les conséquences ne sont pas qu’individuelles, elles sont aussi collectives. Une seule personne très anxieuse peut déstabiliser tout un groupe.

Une éducation au bien-être

La bonne nouvelle, c’est que ce qui marche en négatif marche aussi en positif. Vous connaissez certainement le diction « la joie est contagieuse ». La psychologie positive est venue confirmée ce vieil adage. En effet, la joie se transmet aux autres.

Comme l’explique Christophe André, la joie est même « plus contagieuse que le bonheur. Elle est plus susceptible de nous pousser vers l’action ». La joie est souvent visible, très exprimée, extravertie. Si bien qu’elle peut avoir quelques inconvénients car elle est plus dérangeante, voire offensante pour ceux qui ne vont pas bien. Mais elle reste une force positive qui déborde et nous bouscule. J’ai plusieurs amis qui aiment d’ailleurs parler d’énergie quand ils rencontrent des personnes. Ils disent : « Il/elle a une belle énergie ». Dans un premier temps, je m’offusquais de ce terme d’énergie, qui peut vite passer pour ésotérique. Or, n’est-ce pas le symbole d’une personne qui dégage des émotions positives ?

Outre la joie, toutes les émotions positives sont contagieuses. Elles le sont peut-être moins car la vague de la joie est vraiment forte, mais la gratitude, l’amour, la compassion, la curiosité, la sérénité des autres sont autant de petites doses de positif qui viennent vous réconforter.

Ce constat a donc deux grandes conséquences. La première est qu’il faut savoir s’entourer de personnes plutôt stables émotionnellement et qui ont une tendance à cultiver les émotions positives. La deuxième conséquence est que si vous voulez absolument « aider » les autres, pensez d’abord à vous. Commencez à vous entrainer à la gestion de vos propres émotions. De sorte, en vous consacrant du temps, vous augmentez votre « énergie » et vous serez plus à même de créer une ambiance positive autour de vous.

Ce qui peut paraître comme un postulat égocentrique est à mon sens tout l’inverse. Pour donner il faut d’abord avoir quelque chose à donner.

Dans de prochains articles, je reviendrai longuement sur les outils employés dans cet entrainement mental au bien-être, sur les techniques qui vous permettent de trouver votre équilibre.

A propos de l'auteur

Docteur en psychologie, spécialisé en psychologie du sport et de la santé. Il est notamment l’auteur de « Préparation mentale du sportif » (2017) et « Le bien-être ça se travaille » (2018) aux Editions Vigot. Son approche, basée sur les principes de la Mindfulness et de l’intelligence émotionnelle, propose à chacun d’apprendre à mieux gérer son stress et ses émotions.